Les ballons aux couleurs espagnoles accueillaient les spectateurs de l’Opéra Bastille ce dimanche 17 décembre. Pour cause, Don Quichotte était présenté à l’occasion de la Matinée Rêves d’enfants, organisée par l’Arop (Association pour le rayonnement de l’Opéra de Paris). Une représentation de haute volée avec une distribution multi-étoilée. Les Étoiles Ludmila Pagliero et Mathias Heymann incarnaient les rôle-titres de Kitri et Basilio. Elle, est une Kitri-née et magne les castagnettes à la perfection. Lui et sa barbe de circonstance se dévoilent sous un autre jour, alliant une technique sans faille et une présence scénique indéniables. Ensemble, ils forment un duo flamboyant.
Un couple explosif
Dès son entrée, Ludmila Pagliero donne le ton de la représentation. Sa Kitri est entière, piquante et rayonnante. Son interprétation avait déjà été remarquée il y a cinq ans, elle s’impose encore aujourd’hui dans ce rôle qui semble tout naturellement taillé pour elle. Dix ans après son premier Basilio, Mathias Heymann nous laisse quant à lui bouche bée dès sa première entrée devant tant de facilités. Il semble suspendu dans les airs et chaque réception est moelleuse et soignée. À souligner, son travail sur l’interprétation, juste et bien dosée. Le danseur étoile a franchi un cap avec ce ballet sur point : il investit pleinement son personnage. Mais ce qui fait la force de ce duo est incontestablement que les deux Étoiles sont sur la même longueur d’onde et se répondent impeccablement au niveau des énergies. Leur couple explose en scène.
Le premier acte, pur divertissement, passe à une allure folle. La place de Barcelone était bien animée ce dimanche après-midi, rythmée par l’Espada, très classe d’Audric Bezard et la sensuelle danseuse des rues de Valentine Colasante. Ce premier acte était aussi ponctué par les gags de Sancho Pança (mention spéciale à Erwan Le roux), le Gamache maniéré comme il le faut de Cyril Mitilian ou encore l’excellent Don Quichotte de Yann Chailloux (très beau rôle de composition pour ce danseur!).
Sans oublier, les pétillantes amies de Kitri incarnées par le tandem Sae Eun Park et Hannah O’Neill.
Après un pas de deux tendre et complice au clair de lune entre Kitri et Basilio, le deuxième acte met en avant Paul Marque en chef des gitans. À quelques jours de sa prise de rôle attendue en Basilio, le jeune danseur se sort avec brio de cette variation terrible pour les genoux. Mais les gitans auront raison de Don Quichotte qui finira dans le moulin à vent. Moment romantique, le tableau des Dryades est l’occasion de faire une pause dans ces tempi rapides et enivrés. Cet instant de poésie permet d’apprécier les arabesques suspendues et les majestueux ports de bras de la Dulcinée de Ludmila Pagliero, ainsi que l’altière Reine des Dryades d’Amandine Albisson. Quant à Dorothée Gilbert, son Cupidon est un petit bijou. C’est un vrai luxe d’avoir une étoile de ce rang dans un tel rôle. Citons également les lumineuses Dryades d’Héloïse Bourdon et de Fanny Gorse.
Un grand pas de deux flamboyant
Le troisième acte file à toute allure. La scène de la taverne et la fausse mort de Basilio, interprétée comme il le faut par Mathias Heymann, attireront les rires du public. Le grand pas de deux du mariage clôture cette représentation en apothéose. Ludmila joue de l’éventail dans son impeccable série de fouettés, bien solide sur ses pointes, tandis que Mathias Heymann s’envole dans les airs dans son dernier manège. C’est un vrai feu d’artifice que les deux Étoiles nous ont offert. Une distribution parfaite pour un ballet de fin d’année. Et finalement, ce dimanche 17 décembre ressemblait un peu à Noël avant l’heure.