Les longs tutus vaporeux des Sylphides sont de retour en cette fin de saison sur la scène du Palais Garnier. Le premier des ballets romantiques, sorti des archives par Pierre Lacotte en 1972, est présenté jusqu’au 16 juillet. La représentation du vendredi 7 juillet réunissait les étoiles Amandine Albisson et Hugo Marchand aux côtés de Hannah O’Neill (Effie).
L’intérêt de cette distribution résidait dans la découverte d’Hugo Marchand en James, rôle dans lequel le jeune nantais a été élevé au rang d’étoile à Tokyo en mars dernier. Et très vite, on comprend pourquoi. Le danseur porte le ballet tout le long de la représentation. Et cela dès le premier acte. Beau danseur racé, Hugo Marchand nous fait une belle démonstration d’arabesques aux lignes impeccables et de petite batterie vive et précise. Au delà de la technique son James est vite attachant. On le sent tendrement amoureux d’Effie, incarnée par Hannah O’Neill. Comme on avait pu le voir dans le Songe d’une nuit d’été de Balanchine en mars dernier, les deux danseurs affichent une belle complicité. Mais l’apparition de la Sylphide va vite venir tourmenter notre héros écossais.
Je n’ai jamais vu que l’aspect irréel et féérique dans l’argument de la Sylphide mais aussi comment à la veille d’un engagement, comme le mariage de James et Effie, par peur ou par panique, l’envie de s’échapper pour poursuivre un fantasme ou un idéal peut survenir au risque de tout détruire. La version contée par Hugo Marchand et Amandine Albisson est cohérente avec cette interprétation.
Nul doute que la danseuse étoile a une très belle technique : son travail de pied est même très beau à voir. Pour autant, Amandine Albisson n’incarne pas vraiment la sylphide telle que l’on se l’imagine : évanescente et diaphane. Sa Sylphide est bien plus ancrée dans le sol, plus terrienne en soi, mais bien décidée à piquer James à sa fiancée Effie. Après plusieurs représentations, la fatigue se faisait sentir le vendredi 7 juillet, marquée par quelques fébrilités au premier acte, légers déséquilibres et arabesques qui auraient méritées d’être tenues un peu plus longtemps (mais quand on a encore en tête les interminables équilibres de Dorothée Gilbert en tête dans Giselle, on en deviendrait presque trop exigeant!).
Si l’action tarde à se mettre en place au premier acte, le pas de deux des écossais est l’occasion de mettre en avant la technique et le brio d’un couple de danseurs formé par Emmanuel Thibault, qui faisait là l’une de ses dernières apparitions et Marion Barbeau, très appliquée dans sa variation.
Mais l’un des plus beaux moments de ce premier acte reste le pas d’Ombre. Au cœur de ce pas de trois, Hugo Marchand se révèle encore une fois par ses qualités techniques et de partenaire, ainsi que par sa forte présence scénique. La traversée avec la Sylphide ne semblant toucher terre est toujours l’un des grands moments de la coda (et l’un de mes passages favoris de ce premier acte).
Le second acte est toujours un moment unique. Et les Sylphides suspendues dans les airs font toujours leur effet auprès du public. Avec les coupures opérées pour cette reprise par Pierre Lacotte, celui-ci passe à toute allure! Un vrai marathon pour les solistes. Amandine Albisson y apparaît plus sûre d’elle qu’au premier acte, dévoilant de moelleux ports de bras et une technique solide avec de douces descentes de pointes. Hugo Marchand est toujours aussi brillant et ses variations sont plus que réussies et déchaînent le public. Mention spéciale également aux jolies sylphides du corps de ballet et à la sorcière Madge, campée par un Alexis Renaud très en forme !