Après un petit détour rue Cambon, et une courte pause macaron chez Pierre Hermé, direction le Palais Garnier pour la 64ème représentation de Coppélia, dans la version de Patrice Bart, avec dans les rôles principaux Nolwenn Daniel (Swaldina), Karl Paquette (Franz), Stéphane Phavorin (Coppélius), mais aussi Aurélien Houette (Spalanzani).
(c) Coppélia, saluts |
Comme Patrice l’avait précisé au cours de la dernière rencontre, on est loin de la version de Saint-Léon où Franz délaisse sa fiancée Swaldina pour Coppélia, qui n’est en réalité qu’une poupée. Ici c’est autour de Coppélius que l’action se déroule: Coppélius, qui retrouve dans Swaldina les traits de sa femme, la dénommée Coppélia. L’argument de Patrice Bart repose sur l’étrange ambiguité de cette ressemblance entre la jeune fille et la femme disparue. Grâce aux talents de Spalanzani, Coppélius va tenter de mettre en oeuvre un plan macabre afin de donner la vie à une automate à l’effigie de sa femme, en échange de la vie de Swaldina. Heureusement, Franz sera là pour veiller sur Swaldina.
(c) S.Phavorin, N.Daniel, K. Paquette |
Le ballet s’ouvre avec la musique de Léo Delibes, les thèmes principaux de Coppélia, bien connus, reviennent en mémoire et rappellent de nombreux souvenirs. Mais, l’on se retrouve très vite plongé dans une ambiance noire et calfeutrée, dans l’atelier de Coppélius. C’est Stéphane Phavorin qui incarne Coppélius. Sans aucun doute, que ce soit sur le point technique ou au niveau de l’interprétation, Stéphane Phavorin est le danseur qui aura retenu l’attention du public au cours de cette soirée. Il possède une façon de se mouvoir, de plonger le public dans le personnage de Coppélius, en faisant ressortir ses traits obscurs, et en montrant le côté inquiétant, troublant de ce personnage torturé, obsédé par le souvenir de sa femme qu’il tente de ramener à la vie par le moyen d’un automate grâce à l’aide du vieux Spalanzani. Karl Paquette et Nolwenn Daniel incarnent respectivement Franz et Swaldina. Karl Paquette, n’a certes pas le côté performance technique de danseurs tels que Mathias Heymann mais il allie fougue, vivacité et audace pour composer le personnage de Franz. Il s’en sort également bien dans toutes les variations de Franz, qui demandent une technique solide. Il démontre encore un fois au cours des divers pas de deux (et notamment au cours de l’ultime pas de deux du ballet) ses qualités de partenaire. Nolwenn Daniel est une Swaldina, peut être plus réservée que Dorothée Gilbert mais tout aussi audacieuse. Cette danseuse, que j’ai souvent trouvé raide ou fade en scène, ne m’a hier soir pas déplu en Swaldina: souriante, plutôt ben techniquement, elle s’est bien appropriée le rôle et s’est montrée solide, notamment dans les variations du deuxième acte, lorsque Swaldina montre qu’elle est elle aussi capable d’imiter une poupée. Son partenariat avec Karl Paquette était très équilibré. Les deux danseurs jouaient bien la comédie, sans fausse note dans leur interprétation. Complices, par leurs jeu de regards, ils montraient bien les fluctuations, les moments de jalousies ainsi que les moments plus joyeux.
Au sein du corps de ballet, des individualités se démarquaient. Dans la Mazurka, c’est le danseur Yann Saïz qui se distinguait particulièrement. Parmi les amies de Swaldina, Mathilde Froustey, Charline Giezendanner sortaient du lot. A noter que les petites amies dans l’atelier de Spalanzani et Coppélius ont réussi à faire rire la salle de Garnier par leurs jeux de scène, on retiendra les performances de Mathilde Froustey, Caroline Bance, Laurène Lévy lors de la scène des automates..
![]() |
Nolwenn Daniel (c) Magliocca |
Des chorégraphies de Patrice Bart, il sort de tous les avis: des bons comme des mauvais. S’il faut reconnaître un point commun aux chorégraphies de Patrice Bart, c’est l’art de faire des actes assez déséquilibrés. Comme dans la Petite danseuse de Degas, le premier acte est relativement long (voire un peu trop long). Les danses ont tendance à s’éterniser, le rapport ambigu Swaldina/Coppélia traîne. Le second est beaucoup plus court, mais plus dynamique et riche en action. Il est assez aisé de reconnaître une mise en scène d’une production de Patrice Bart, quelques similitudes au niveau de l’ambiance qui se dégage, se retrouve avec la petite danseuse de Degas. L’ambiance du premier acte est ainsi très calfeutrée, alors que celle du second acte est très différente. Côté choix musicaux, la musique de Lakmé, qui s’assimile aux passages plus « noirs » du ballet, se mélange bien à celle de Débussy.
Cette version de Coppélia, entrée au répertoire de l’Opéra de Paris en 1996, est à voir. Stéphane Phavorin a reçu une belle ovation, bien méritée, à la fin de la représentation.
A lire sur le même sujet