Quand Dorothée Gilbert et Hugo Marchand dansent ensemble, c’est un peu une évidence. Les deux danseurs se sont livrés avec passion hier après-midi dans Roméo et Juliette sur la scène de l’Opéra Bastille.

Ce n’est pas la première fois que Dorothée Gilbert et Hugo Marchand sont associés. Que ce soit dans Manon l’an dernier ou dans la Bayadère en décembre, les deux danseurs créent à chaque fois l’émulation. Bien entendu, il était hors de question de manquer leur prestation, surtout dans un ballet aussi fort et intense que Roméo et Juliette.
Hugo Marchand, promu Premier danseur lors du dernier concours de promotion, faisait hier après-midi ses premiers pas dans le rôle de Roméo. Le jeune homme impressionne par sa technique flamboyante d’une part, et par son interprétation si juste du personnage, sans passer à côté et sans en faire trop. Le danseur montre une fois de plus une forte présence scénique. Son Roméo est différent de celui de Mathieu Ganio, moins rêveur et plus solaire. Dorothée Gilbert, qui avait déjà interprété le rôle de Juliette en 2011, montre à nouveau son évolution artistique. Elle joue à merveille la jeune fille vive et espiègle au premier acte, qui tombe amoureuse pour la première fois. Et l’on croit aisément à la première rencontre entre les deux personnages lors du bal du Madrigal. Ce premier pas de deux est juste et touchant. La connexion est forte entre les danseurs. À la fin du du long et périlleux – mais si romantique – pas de deux du balcon on sent Dorothée Gilbert pousser et encourager son partenaire dans ce long marathon.

Au deuxième acte, plus centré sur le personnage de Roméo, Hugo Marchand s’impose encore plus en scène. Le trio formé par Roméo/Mercutio/Benvolio, interprété hier par Allister Madin (Mercutio) et Mickaël Lafon (Benvolio), est équilibré. Le rôle du facétieux personnage va comme un gant à Allister Madin, qui n’a peut-être pas la prestance d’un François Alu, mais qui ne manque pas de nous faire sourire par ses pitreries dans les deux premiers actes. L’affrontement entre Roméo et Tybalt, campé par le ténébreux Audric Bezard, est très réussie. Audric Bezard (en scène dans Seven sonatas de Ratmansky la veille à Garnier) est excellent dans le rôle du cousin de Juliette, sans pitié et glaçant. Une très belle performance. La fin de ce deuxième acte est poignante avec l’entrée en scène de Juliette, qui découvre que Roméo a tué son cousin. La danseuse Étoile y est renversante.

L’émotion monte crescendo au fil du troisième et dernier acte (et cela se ressent même jusqu’au deuxième balcon). Dorothée Gilbert apporte avec justesse toutes les nuances à son personnage. Elle est déchirante et émouvante. Les deux danseurs sont totalement investis dans leurs personnages, ce qui donne encore plus de sens au pas de deux final. Et quelques larmes coulent sur les dernières notes de la musique de Prokofiev.

Saluts de Roméo et Juliette

Saluts de Roméo et Juliette

Finalement cette représentation se termine sur l’impression qu’il y avait tout avec ce duo : la technique, sûre et solide, et surtout l’interprétation, si juste et si bien dosée. Le tout porté par une distribution équilibrée et de beaux seconds rôles. L’alchimie qui manquait lors de la première est ici complètement présente. Aux saluts, les Roméo et Juliette du jour ont le visage encore marqué par leurs personnages. Une magnifique représentation avec sans conteste, l’un des plus beaux couples de danseurs actuellement  à l’Opéra de Paris.

Dorothée Gilbert et Hugo Marchand danseront à nouveau Roméo et Juliette les 8, 12 et 15 avril prochains. Courez-y !

Dorothée Gilbert et Hugo Marchand

Dorothée Gilbert et Hugo Marchand